L’Internet des objets ou IoT (Internet of Things) est en plein essor depuis cinq ans et est promis à un avenir à fort potentiel. En particulier, les entreprises du secteur du transport public mettent en place des projets IoT, rendus possibles par l’amélioration et la diversification des technologiques disponibles (diminution des tailles et baisse des coûts de capteurs, émergence de nouvelles connectivités, etc.). L’année 2020 devrait donc marquer un tournant avec le passage à l’échelle de plusieurs projets ambitieux.
I. Les familles de cas d’usage IoT dans le secteur du transport public
L’IoT peut répondre à de nombreux cas d’usage dans le secteur du transport public. Ces différents cas d’usage peuvent être catégorisés comme illustré ci-dessous.
Familles de cas d’usage de l’IoT dans le secteur du transport public
II. L’IoT dans le secteur du transport public répond à quatre enjeux principaux
L’IoT dans le secteur du transport public est pensé pour résoudre des problématiques précises. Celles-ci se concentrent à date sur quatre enjeux principaux présentés par ordre de priorité pour les acteurs du secteur.
- La sécurité
La sécurité des usagers et des agents est une priorité, si ce n’est la priorité, des acteurs du transport public. Les capteurs IoT permettent d’une part d’accroitre la prévention des incidents et d’autre part d’en réduire l’impact, en détectant par exemple le verrouillage des portes de matériel roulant.
b. La réduction des coûts de maintenance
L’IoT est également utilisé pour soutenir la maintenance réactive, empêchant une interruption de service trop longue lors d’une panne effective sur une infrastructure par exemple.
La valorisation des données collectées devra également à terme soutenir la mise en place d’algorithmes de maintenance prédictive. Des entreprises du secteur du transport public travaillent déjà sur des cas d’usage concrets, comme la prévention des pannes de moteurs d’appareil de voie.
c. L’optimisation de l’allocation des ressources humaines et matérielles
L’IoT améliore également l’allocation des ressources humaines et matérielles. Il devra permettre à terme de limiter la surveillance physique et ainsi permettre aux ressources humaines de se concentrer sur les tâches à valeur ajoutée. La géolocalisation permet également de réduire les pertes de matériel et de temps. Le matériel de chantier en particulier est coûteux et réutilisable, sa géolocalisation permet donc d’économiser son coût de rachat et le temps de recherche associé.
d. Amélioration de la qualité de service
L’IoT permet d’accroitre la qualité des services à disposition des usagers (agents ou voyageurs) pour leur garantir une meilleure expérience utilisateur (taux de remplissage des rames par l’installation de capteurs IoT sur les quais et dans les rames, surveillance de l’état de nettoyage du matériel roulant, géolocalisation en temps réel des bus et tramways etc.)
III. Les spécificités de l’IoT dans le secteur du transport public
- Les spécificités technologiques
L’IoT appliqué au transport public a des contraintes particulières pour le choix de la connectivité et des capteurs.
- Les capteurs
Le choix ou le design des capteurs IoT pour le transport public doivent répondre à des contraintes spécifiques. Lorsqu’ils sont dispersés sur le réseau ferré, les capteurs doivent résister à des conditions parfois extrêmes qui leur demandent une forte adaptabilité : fortes variations de température, vent, vibrations, passages de trains de plusieurs tonnes, etc. Par ailleurs, le lieu de pose ainsi que la précision nécessaire de la mesure de la donnée des capteurs IoT sont à coordonner aux normes européennes et françaises du transport.
En conséquence, la majorité des cas d’usages étudiés s’appuient essentiellement sur des capteurs conçus par des start-ups, des PME, ou des co-développements dans le cadre de partenariats, faute de standards encore adaptés sur le marché. Un point d’attention est donc à mettre quant au temps à allouer à leur conception spécifique et à leur homologation.
Le déploiement de capteurs peut s’avérer chronophage du fait d’un territoire à couvrir important, à accessibilité variable et au nombre de capteurs élevé. La difficulté porte sur la capacité à fournir une cartographie précise pour l’installation des capteurs.
ii. La connectivité
La connectivité IoT dans le domaine du transport public doit adresser trois grandes contraintes spécifiques : la couverture des zones rurales, souterraines et la connectivité en situation de mobilité. Cependant, même si les connectivités IoT permettent d’adresser de nouveaux cas d’usage, elles n’ont pas vocation à court terme à remplacer les réseaux privés dédiés à la sécurité (par exemple le réseau GSM-R qui permet en cas d’urgence la priorisation des appels et l’allocation de ressources réseau).
iii. Les plateformes
A l’heure actuelle, il n’y a pas sur le marché des plateformes IoT clé en main pour adresser le panel des cas d’usage du transport public. En effet, le choix d’une plateforme IoT doit prendre en compte de nombreux critères : périmètre fonctionnel, intégration avec l’écosystème, hébergement, sécurité etc. Si les acteurs du secteur peuvent s’entourer de partenaires technologiques, il n’en demeure pas moins qu’ils devront consentir à un effort important pour le développement et l’intégration de leur plateforme IoT.
b. Les spécificités organisationnelles
Les entreprises du secteur du transport public peuvent être structurées en de nombreuses entités fonctionnelles ou/et territoriales. Pour des objectifs d’homogénéisation et de rationalisation à l’échelle du groupe, il est nécessaire de structurer une organisation adaptée qui doit permettre le partage d’informations cross-entités et l’émergence de standards et de solutions applicables au groupe. Cette organisation doit avoir à cœur d’accompagner la multiplicité des acteurs (personnel en gare, maintenance, signalisation et aiguillage, conducteur de matériel roulant etc.) dans la prise en main des services IoT pour garantir leur adoption.
Conclusion
L’IoT dans le secteur du transport public entame une phase d’industrialisation avec des défis propres à relever. Les choix technologiques, des capteurs à la connectivité, et organisationnels doivent être au cœur de la définition d’une stratégie IoT pour le transport public. L’IoT, associé à d’autres technologies, pourrait ainsi devenir un vecteur de la transformation des entreprises du secteur confrontées en France à de nombreux défis avec l’ouverture à la concurrence ou encore l’organisation des Jeux Olympiques 2024.
Co-auteurs : Romain Pointereau et Alice Morize.