Bpifrance Inno Génération 2018 : une nouvelle vision de l’entreprise
Le jeudi 11 octobre 2018 la BPI France a rempli l’AccorHotels Arena avec plus de 43,000 visiteurs autour des pépites de l’innovation française. Cette quatrième édition, marquée par le positivisme, a rassemblé des start-ups, des grands groupes et le secteur public autour d’une vision renouvelée pour une économie toujours plus forte, plus ambitieuse et collaborative. Le patron de la BPI, Nicolas Dufourcq, pense que pour la réussite individuelle et collective tout est une et l’entraide est nécessaire !
Les ICO vont-elles s’imposer en France ?
Atelier animé par Ivan de Lastours, Key Account Manager à Bpifrance Le Hub. En partenariat avec Blockchain Partner.
Intervenants : Ivan de Lastours (Bpifrance Le Hub), Claire Balva (Blockchain Partner), Domitille Dessertine (AMF), Carole Vachet (Ministère de l’Economie et des Finances), Arthur Breitman (Tezos), Frédéric Montagnon (LGO Exchange)
L’initial coin offering (ICO) est une méthode de levée de fonds à la croisée des chemins de la technologie blockchain et de l’investissement. Entre risque et rendement, où en est-on fin 2018 ? Quelle est la place de la France dans cet écosystème ?
Quel impact ont eu les ICO sur les projets entrepreneurials ?
Une ICO (Initial Coin Offering) est une méthode de levée de fonds fonctionnant via l’émission d’actifs numériques (utility tokens). À la différence d’une levée de fonds traditionnelle en venture capital (VC), l’investisseur n’achète pas des actions de l’entreprise quand il participe à une ICO. Les tokens ont vocation à être utilisables dans le projet financé par l’ICO en question, ces tokens peuvent être échangés, vendus ou détenus.
Un STO (Security Token Offering) est une méthode alternative à l’ICO et c’est un modèle commercial qui atténue les risques pour les investisseurs. De plus, les tokens de sécurité sont essentiellement des titres financiers et sont donc protégés par des actifs corporels, des bénéfices ou des revenus de la société.
Les ICO ont permis à la fois de mettre en avant les projets blockchains et ils ont donné la possibilité de financer ces projets avec des montants plus importants qu’en venture capital. Cette facilité de financement permet un développement accéléré de la technologie blockchain. Le côté négatif a été la surmédiatisation qui a attiré des projets non pertinents.
Il n’y pas que du mauvais dû à la médiatisation ; cette dernière a permis de mettre en lumière une méthode très innovante de levée de fonds dans l’écosystème du numérique, notamment dans la blockchain. On voit à l’horizon l’arrivée des security token offerings (STO), qui est une piste pour réinventer la levée de fonds classique et probablement trouver une méthode hybride entre les ICO et le venture capital (VC).
Au-delà d’une simple méthode de levée de fonds, les entreprises choisissent de faire une ICO pour deux raisons : comprendre leur marché et se faire connaitre. En effet, les personnes investissant dans des projets en ICO sont majoritairement de futurs clients du produit. L’ICO offre ainsi la possibilité de pouvoir construire un projet avec ses utilisateurs, qui seront ses clients de demain.
Cadre réglementaire et législatif, où en est-on ?
La clarté règlementaire et législative est indispensable pour le sain et bon développement de cet écosystème en général. La France veut se positionner comme pionnière sur un sujet qui aura un impact majeur sur la façon de faire du business dans les années à venir et donc sur l’économie du pays.
Il existe une collaboration étroite entre les entreprises, startups et les entités publiques pour dessiner la future réglementation. Les deux piliers de ces collaborations sont :
- L’implémentation d’une règlementation « ad hoc » évolutive et collaborative entre l’autorité des marchés financiers (AMF) et les entreprises (startups, investisseurs, grand groupes, etc…) ;
- Le programme Universal Node to ICO Research & Network (UNICORN) qui est un système d’appel à projets pour conseiller et accompagner ceux qui veulent réaliser une ICO.
La France a opté pour un visa optionnel pour les ICO dans le cadre du projet de loi PACTE, dans l’objectif d’offrir une meilleure protection des investisseurs tout en permettant le développement de projets innovants en France. Compte tenu de la nature transfrontalière de ces projets, la diversité d’approches règlementaires au niveau international constitue un point de vigilance. Dans ce contexte, la coopération internationale et européenne est essentielle pour identifier les fraudes et mettre en place un cadre réglementaire cohérent.
Le projet loi PACTE, qui vient d’être adopté en première lecture par l’assemble nationale, pose le principe de la compétence de l’AMF au sujet des ICO. Ainsi, cette loi permet aux acteurs intéressés remplissant un certain nombre de conditions (personnalité morale, sécurisation des fonds, lutte contre le blanchissement, vérification du « White Paper » par l’AMF, etc.…) de solliciter un visa.
Le projet loi PACTE prévoit également des dispositions visant à assurer un accès non discriminatoire aux services bancaires pour les acteurs ayant un visa de l’AMF, jusqu’à présent discriminatoire pour les projets qui souhaitaient réaliser une ICO. En pratique, une banque doit justifier un refus d’ouverture de compte à l’Autorité du Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR) et à l’AMF. L’ACPR est le régulateur français des banques et des compagnies d’assurance. Tout projet d’offre publique portant sur un établissement financier ou sur une société contrôlant un établissement financier ou une compagnie d’assurance doit lui être soumis préalablement à son lancement.
En parallèle, les autorités nationales travaillent sur un cadre comptable pour que l’encadrement soit complet et satisfaisant pour les émetteurs de « tokens ». Les lignes directrices de cette nouvelle comptabilité devront être prêtes pour la fin d’année.
Quels sont les tendances des ICO ?
Un constat est fait par tous les intervenants : le marché actuel des crypto-monnaies stagne, mais les technologies de rupture continuent de se développer. Les avancements technologiques de la blockchain ne dépendent pas des cours des crypto-monnaies, au contraire depuis leur stagnation les projets se sont diversifiées sur des utilisations autres que les crypto-monnaies.
Les ICO comme mode de financement demeure encore marginal d’après l’étude réalisé par l’AMF, représentant au total 19,4 milliards d’euros depuis 2014. A titre de comparaison, les ICO ont représenté 1,6 % du financement mondial en actions en 2017.
La majorité des ICO a eu lieu aux États-Unis, en France il y a eu seulement 15 ICO qui ont levé 89 millions. En matière de secteur, les projets se sont diversifiés au-delà du secteur technologique et touchent désormais les domaines de la santé, de l’énergie et du commerce du détail.
Concernant le marché français, les tendances sont :
- De manière générale, les ICO sont envisagées par des start-ups, afin de développer une communauté d’investisseurs engagés ou afin de préserver l’intégrité de leur capital ;
- La majorité sont des projets technologiques qui proposent des applications blockchain ou de trading ;
- Il commence la diversification dans d’autres secteurs et les projets sont plus ambitieux en termes financiers, ils espèrent collecter entre 1 et 180 millions d’euros ;
- La plupart des projets d’ICO à venir ont déjà levé des fonds via des canaux de financement traditionnel ;
Une nouvelle méthode de financement alternative à l’ICO est arrivée, les STOs, cette méthode de financement permettrait de totalement délier le cours des cryptos et le développement des projets.
Cependant, les STO ne sont pas encore arrivés en France pour des raisons juridiques mais ils ont le potentiel d’être un levier de croissance important sur cet écosystème et ils vont pas tarder à s’imposer dans le pays comme se fait dans le reste du monde pour les projets qui n’ont pas besoin d’un utility token.
Conseils aux entrepreneurs dans l’écosystème blockchain et pour ceux qui pensent faire une ICO
Si la blockchain vous intéresse, foncez ! Que ce soit dans les domaines juridiques, technologiques ou financiers, tout ou presque reste à construire, et le secteur fait pour le moment face à des difficultés pour trouver des profils techniques.
Cependant, l’ICO n’est pas une solution qui convient à tous les projets…
Il y a des projets qui vont naturellement et spontanément devoir exister sur une blockchain parce que c’est vraiment la seule manière de le faire. Par exemple, le projet Funnychain qui permettra de redistribuer l’argent des publicités à l’ensemble des utilisateurs de la plateforme, une entreprise achèterai des tokens aux utilisateurs pour ensuite promouvoir ses produits sur le site. Sans tokens, impossible d’utiliser le service, qui fonctionnera sans autorité centrale.
Cependant, la plupart des projets n’ont pas besoin de décentralisation et une grande majorité des idées n’ont pas besoin de blockchain. Donc, un conseil à suivre est de ne pas essayer de coller un token sur un projet qui n’en n’a pas besoin.
Conclusion
Les ICO sont un mode de levée de fonds encore naissant et qui tend à se structurer, permettant l’émergence et le financement de nouvelles entreprises de secteurs technologiques et innovants, notamment la technologie blockchain.
Au final, les succès récents observés, l’émergence de nouveaux types d’émetteurs innovants, la démocratisation d’une nouvelle forme d’engagement dans un projet d’entreprise pour les investisseurs, ainsi que les possibilités de désintermédiation permises par la technologie blockchain, laissent à penser qu’il y a de la place pour ce nouveau processus de levée de fonds aux côtés des canaux habituels
La France est un bon endroit pour se poser la question de faire ou pas une ICO et pour entreprendre dans l’économie numérique car il existe un cadre légal et tous les acteurs sont moteurs (gouvernement, investisseurs et entrepreneurs).