Depuis l’antiquité, la monnaie est le moyen d’échange principal au centre de l’activité économique. Sa forme n’a cessé d’évoluer au fil du temps; de l’état primitif (matières premières, produits agricoles ou artisanaux) à trois formes communément utilisées : des pièces métalliques basées sur les métaux précieux, le Billet de banque (encore appelé monnaie fiduciaire) et enfin la monnaie de banque (encore appelé monnaie scripturale : dépôts, chèques, virements etc.). Aujourd’hui, la monnaie est principalement dématérialisée : les espèces ne constituent plus qu’une petite partie de la masse monétaire.
Les crypto-monnaies
Une diversité de monnaies est utilisée dans le monde, appelée communément devise monétaire en vigueur sur un territoire ou une zone définis. L’émission de billets ou de pièces dans la devise et la création monétaire sont contrôlées et régulées par l’État ou l’Institution qui exerce son l’autorité sur la zone définie (Banque Centrale). Ces devises s’échangent entre elles dans le cadre du système monétaire international.
Sous la houlette de l’ère digitale, les échanges commerciaux et/ou financiers ont considérablement évolués entraînant le système vers des crises sans précédent. De plus, les technologies nouvelles issues de la combinaison de l’Internet et des capacités de calcul des ordinateurs provoquent une formidable mutation des technologies de l’information, de son authentification et de son traitement. De fait, la capacité de calcul des grands ordinateurs doit permettre de tenir à jour de manière instantanée l’état des dettes et des créances des différents agents de l’économie. C’est donc une monnaie digitale qui se profile. Cette monnaie digitale comportera une double caractéristique: elle sera peer to peer et elle sera universelle. Cette révolution digitale se manifeste de nos jours par l’apparition de crypto-monnaies dont le bitcoin fait partie. Elles présentent par rapport aux monnaies classiques des différences structurelles :
- Contrairement aux devises monétaires classiques, la crypto-monnaie n’est pas l’incarnation de l’autorité d’un État, d’une banque ou d’une entreprise. Sa valeur est déterminée de façon entièrement flottante par l’usage économique qui en est fait et par le marché des changes. Les règles organisant l’émission monétaire sont quant à elles déterminées uniquement par le code informatique libre du système;
- Le système de paiement se distingue par le fait que son fonctionnement ne requiert pas l’utilisation d’une infrastructure centralisée tenant les comptes des montants détenus afin d’assurer les transactions. Le rôle de garantie et de vérification existe, mais est attribué de façon aléatoire à un ordinateur du réseau en fonction de paramètres définis;
- La crypto-monnaie repose sur un protocole cryptographique notamment pour, d’une part, résoudre le problème dit du double paiement, qui avait jusqu’alors empêché l’émergence d’un tel type de monnaie, et pour, d’autre part, garantir l’impossibilité de falsifier les identifiants des parties prenantes et la valeur du stock de crypto-monnaies figurant dans les porte-monnaies électroniques.
Focus sur le bitcoin
Une dizaine d’années après la faillite de Digicash (première monnaie virtuelle), Satoshi Nakamoto (uniquement connu sous ce pseudonyme) conçoit le Bitcoin en 2009. Le Bitcoin est un système de paiement basé sur le bitcoin qui est une monnaie électronique décentralisée. Le bitcoin utilise la cryptographie pour contrôler sa création et sa gestion d’où le nom de crypto-monnaie. La plupart des crypto-monnaies sont conçues pour introduire graduellement de nouvelles unités de monnaie, tout en plaçant une limite au total de monnaie qui sera à terme en circulation. Ceci est fait dans le but d’imiter la rareté (et la valeur) des métaux précieux et d’éviter l’hyperinflation. Il y a aujourd’hui environ 15 millions de bitcoins en circulation pour un maximum de 21 millions selon sa conception. Le réseau ne peut pas déterminer la valeur du bitcoin par rapport aux monnaies classiques ou même aux biens de la vie réelle. Cette tâche est laissée aux forces du marché avec des gens qui échangent des bitcoins sur des plateformes en ligne. Aujourd’hui, la parité bitcoin/dollar est de 400 dollars environ pour un bitcoin soit 6 milliards de dollars en tout. La volatilité reste néanmoins forte du fait des questions qui se posent autour de sa pérennité.
La pérennité du bitcoin repose presque entièrement sur son mode de fonctionnement qui allie collaboration participative et réseau peer-to-peer. Ces deux concepts, en apparence anodins, permettent de créer un réseau totalement décentralisé. Tout le monde peut participer, car il faut juste se connecter à Internet et lancer le logiciel du Bitcoin. Les ordinateurs des utilisateurs forment un réseau dans lequel chaque machine héberge une copie,constamment mise à jour, du Block Chain. Le Block Chain sert de registre officiel en ligne de chaque transaction en bitcoin depuis l’émission de la première unité. Il possède aussi une structure de données qui permet à ces enregistrements d’être mis à jour avec le minimum de risques de piratage ou de corruption. En effet, bien que le système soit ouvert, personne ne doit pouvoir réécrire le registre pour dépenser les mêmes bitcoins deux fois. Pour assurer cela, l’ajout de nouvelles transactions au registre est piloté par le minage du Bitcoin (expliqué ci-dessous).
En principe, le minage permet de sécuriser le Block Chain parce qu’un seul mineur ne peut pas résoudre l’ensemble des équations. Cela signifie que personne n’aura un accès aux liens chiffrés dans le Block Chain pour réécrire le registre. Le minage permet aussi d’augmenter progressivement la production du bitcoin. Le mineur, qui résout les équations pour former un nouveau bloc, obtient 25 nouveaux bitcoins. La conception de Nakamoto contrôle la production en ajustant automatiquement la difficulté des équations pour qu’un nouveau bloc soit ajouté toutes les 10 minutes. La récompense, pour créer chaque nouveau bloc, diminue de moitié tous les 4 ans pour respecter la limite de la production à 21 millions de bitcoins.
Les autres crypto-monnaies
La réussite du bitcoin et ses spécificités (limitation à 21 millions de bitcoins, utilisation du CPU, consommation énergétique etc.) ont favorisé l’émergence de nombreuses autres crypto-monnaies. On en dénombre plus de 500 actuellement dont les plus significatifs sont :
- Ripple (2013) : deuxième crypto-monnaie la plus utilisée après le bitcoin
- Litecoin (2011) : première crypto-monnaie fondée sur Scrypt
- Darkcoin (2012) : première crypto-monnaie anonyme
- Dogecoin (2013) : crypto-monnaie dérivée de Litecoin et première à être fondée sur un même Internet : Doge
- Peercoin (2012) : pas de limite du nombre d’unité, des frais de transactions et une inflation de 1 %
- Namecoin (2011) : crypto-monnaie ayant pour but d’agir comme un DNS décentralisé, qui rend la censure d’internet très difficile
Substitution ou complément pour les monnaies traditionnelles ?
L’ère digitale risque assurément de bouleverser toutes les conceptions qui gravitent autour de la monnaie. Cela signifierait la disparition de la monnaie telle que fabriquée, diffusée et gérée par les organes et institutions qui avaient accompagné la naissance des monnaies modernes : essentiellement les banques. La compensation des dettes et des créances se ferait indépendamment des devises, des zones monétaires, et des souverainetés. L’émission monétaire passerait de la responsabilité d’un organe central à celui de la masse des agents économiques individuellement.
C’est dans la réalité toute l’économie bancaire et financière qui serait secouée. En effet, l’essentiel des revenus des banques leur vient de leur haute main sur la circulation de l’argent c’est-à-dire la compensation des dettes et des créances. Plus complet et total est ce contrôle, plus les banques en tirent la capacité de prêter, sans contrainte et sans frein. L’ère digitale augmenterait fortement ce qu’on nomme les fuites dans le système bancaire et poserait une entrave à leur liberté de création monétaire, mettant en cause, par voie de conséquence, l’existence des banques qui ne parviendraient pas à s’adapter à ce gigantesque choc, bien plus lourd que les mesures prises pour les contraindre à renforcer leurs capitaux propres ou encore l’évolution de leur métier (dématérialisation des agences, digitalisation des pratiques etc.).
À cette vision digitale on pourrait objecter qu’il est illusoire de penser que la diversité des systèmes monétaires et des devises puisse être abolie d’un coup de baguette digitale grâce aux grands ordinateurs et à la mise en place d’un Big data monétaire. Cette objection est bien fondée si on suit les problèmes que font face les crypto-monnaies (faille de sécurité, forte volatilité, volume des transactions, masse monétaire…). D’ailleurs, la conception intrinsèque des crypto-monnaies amène à penser que les inventeurs des monnaies digitales s’ingénient à réinventer l’or.
Toutefois, le Block chain est un concept très puissant qu’on peut appliquer à de nombreux autres domaines. Par exemple, il pourrait être utilisé pour créer des contrats auto-certifiés afin d’effectuer automatiquement un paiement lorsqu’une tâche est accomplie. Son usage peut être aussi transposé dans des systèmes de vote ou le fonctionnement des plateformes de Crowfunding. En 2014, pour développer facilement de telles applications, Gavin Wood et Vitalik Buterin ont proposé un moyen de combiner le Block Chain avec un langage de programmation : Ethereum. Wood a déclaré qu’Ethereum est idéal dans les situations où le contrôle central est une faiblesse, par exemple, quand des utilisateurs ne se font pas confiance.
Enfin, certains estiment que le Bitcoin ne sera pas pérenne comme une entité décentralisée. De la même manière que l’univers de la musique en streaming a évolué de Napster en passant par des protocoles de peer-to-peer à des services comme Spotify et Apple Music, les crypto-monnaies pourraient bien suivre la même trajectoire si les banques se lancent dans l’aventure en pensant y trouver leur compte…
Le monde change et nous apporte de nouvelles technologies. Pourquoi est-il si étonnant que dans le marché financier ce soit aussi pareil. Je crois que les monnaies virtuelles vont coexister avec les devises fiduciaires. En attendant que mes prévisions s’appliquent, mon portefeuille sur cryptocurrency-global ne souffre de rien. Ma stratégie est toute simple : j’achète, je vends, je récupère les profits et je les garde. Si après, les régulations des Etats venaient à changer, ce serait autre chose.