Entre quatorze et dix-sept heures par jour pour un nouveau-né, huit et dix heures pour un adolescent et entre sept et neuf heures pour un adulte : Vingt-cinq ans, soit le tiers de notre vie, à dormir. Et même si chacun a bien conscience que soigner son sommeil contribue – au même titre qu’une alimentation saine et une activité sportive régulière – à son équilibre, 30% des français ont une durée de sommeil insuffisante.
Les conséquences du manque de sommeil sont nombreuses : Manque de concentration, stress, troubles de la mémoire,... Le marché du sommeil, dominé historiquement par les laboratoires pharmaceutiques – 4,2 millions de Français consommeraient des somnifères pour pallier aux troubles du sommeil – est depuis peu en proie au changement. Les technologies, qui ont traditionnellement mauvaise presse auprès des spécialistes pour leurs propensions à augmenter les difficultés d’endormissement, ont fait peau neuve.
Comment les technologies se sont-elles misent au service de notre sommeil ? La troisième révolution industrielle va-t-elle bouleverser notre oreiller ? Réponses.
Une première génération de technologies
Sleep as Android, Sleepbot, SleepTime,… Sur les stores, on trouve de nombreuses applications proposant une assistance au sommeil. En utilisant les capteurs (accéléromètre, gyromètre) présents dans nos smartphones, bracelets ou montres connectées, ces applications analysent nos nuits au travers des mouvements réalisés par le corps et sont en mesure de nous proposer, entre autre, un réveil intelligent. Ces services, si ils permettent de mieux connaître et réguler nos nuits restent néanmoins limités en fonctionnalités.
Heureusement les découvertes scientifiques ont permis d’aller plus loin. Les études sur les réactions du corps face aux stimuli extérieurs mettent l’accent sur le lien entre luminosité et sommeil. En effet, la sécrétion de mélatonine, vulgairement appelée hormone du sommeil, serait rythmée par la perception de spectres lumineux spécifiques. Les ondes sonores, selon leur fréquence et leur rythmicité, auraient aussi une influence sur le cerveau en période d’endormissement.
Sur cette base, de nombreux projets peuvent être cités :
- La luminothérapie : Les premiers produits utilisant la luminothérapie ont été proposés au grand public à la fin des années 90 par Philips, s’appuyant sur les études qui lient effets physiologiques à des spectres lumineux spécifiques. Certaines lampes proposent maintenant des programmes dédiés à l’endormissement et au réveil.
- Les nouveaux services grand public, tels que les « Pods » proposés par la Start-up Finlandaise Gosleep. Non sans rappeler le cinquième élément, ces cabines à sieste permettent à l’utilisateur de se trouver facilement en situation de confort. Disponibles dans certains aéroports (Helsinki, Abu Dhabi), elles permettent à l’individu d’être protégé des sons et de la lumière extérieure. C’est dans un environnement confiné que le box peut proposer sa propre atmosphère relaxante.
- Plus récemment, d’autres innovations se sont développées : S’appuyant toujours sur le couple son/lumière relié et analysé par le smartphone, la start-up Lyonnaise Napiz propose un combiné triple action. Un masque (semblable à ceux distribués dans les aéroports) intégrant des diodes lumineuses, synchronisé avec le haut-parleur du smartphone et contrôlé par une application : Des scénarios prédéfinis son/lumière aident à l’endormissement et au réveil.
Aller plus loin dans la compréhension du sommeil
Le sommeil se compose de plusieurs phases. Les stades 1 et 2, appelés sommeil léger, constituent les périodes d’endormissement : On constate une relaxe musculaire et la sortie de sommeil est facile. Les stades suivants (3 et 4) sont appelés sommeil profond : C’est le sommeil réparateur, celui qui nous soulage physiquement et psychiquement et où intervient notamment la consolidation de la mémoire et la régénération cellulaire. Enfin, vient le sommeil paradoxal, pendant lequel les spécialistes ont décelé des activités cérébrales intenses, le moment propice aux rêves.
Le cycle crucial – celui permettant de nous remettre de nos journées de travail acharnées – est celui du sommeil profond. C’est lui qu’il faut tenter d’étendre, de maximiser, d’optimiser. Certains, comme Barack Obama, arrivent à s’y plonger rapidement et durablement et n’ont donc besoin que de quelques heures de repos. Mais pour les autres, comment faire ?
Un domaine nouveau : Les neurotechnologies
La régulation du sommeil profond, c’est la promesse que nous fait Dreem, jeune pousse Française des neurotechnologies, avec son bandeau connecté équipé d’électroencéphalogramme et de capteurs sonores proposant des algorithmes développés par leurs soins. Le bandeau a pour rôle d’aider son porteur à améliorer la durée et la qualité du sommeil profond. L’appareil mène plusieurs actions simultanées : Il capte les émissions d’ondes cérébrales, analyse leur fonctionnement et stimule le cortex selon les informations collectées. Tout ça pendant notre sommeil.
De la science-fiction? Peut-être. Sauf que la start-up, créée en 2014 par deux étudiants de Polytechnique – et qui avait déjà réalisé avec succès plusieurs levées de fond – est devenue grande : trente-cinq collaborateurs, un bureau Parisien à Opéra et un second à San Francisco. Bien que discrète sur le montant et la nature des investisseurs, on sait déjà qu’elle a remporté de multiples prix : 200 000 € au concours mondial de l’innovation, 25 000 € au Prix Gérondeau de l’École Polytechnique, 15 000 € au prix du Fellowship de cette même école et encore 12 000 € lors des Grands Prix de l’Innovation de Paris.
Pour gagner en crédibilité, les fondateurs ont su s’entourer : C’est avec l’aide de spécialistes du sommeil de la Pitié Salpêtrière et une équipe de chercheurs en neurosciences de l’Institut du Cerveau et de la Moelle épinière que le projet a réussi à convaincre les investisseurs.
Mais les ambitions de Dreem ne s’arrêtent pas là. Selon les dirigeants, le bandeau connecté ne se réduira pas à améliorer la productivité et le dynamisme du grand public. Il permettra également de prévenir des maladies comme Alzheimer ou Parkinson. Ce bandeau ne serait donc que le premier des projets de Dreem. Quoiqu’il en soit, si la Start-up Française répond un tant soit peu à ses promesses, le projet lui permettra peut-être de de prendre une bonne place au sein des entreprises de neurotechnologies.
Tous les produits listés ci-dessus ne représentent que quelques exemples parmi la multitude de solutions existantes. Pour en citer une dernière : nous parlions il y a peu de LULLY, l’objet connecté des nuits « sans coutures », au service des parents pour la réduction des cauchemars de leurs enfants : un autre produit pour une autre cible. Les technologies au service du sommeil n’ont donc pas fini de faire parler d’elles.
L’utilisation de la nouvelle peut être profitable dans tous les domaines d’activité. Que ce soit dans le domaine de la santé, de l’éducation ou tout autre. En revanche, il n’en tient qu’à chacun de voir s’il veut l’utiliser à bon escient ou pour des actes de malveillance. De même, il est aussi le rôle de tout un chacun de veiller à la sécurité de ses données.