L’Intelligence Artificielle, l’avenir de l’humanité ? (partie 1)

Avec un titre pareil, on espère lire un éclairage proche de Minority Report et sa vision de l’homme au sein des mutants, ou d’Iron Man et son omniscient assistant JARVIS. Mais avant d’aller si loin dans la futurologie, il est indispensable de mieux appréhender le concept même d’ « Intelligence Artificielle » : mot fourre-tout déjà galvaudé, il porte pourtant des notions précises permettant de comprendre comment la technologie évolue et va continuer d’évoluer.

AI : Artificial Intelligence

Une recherche dans Google image sur les termes « intelligence artificielle » suffit pour voir à quel point on associe le concept avec  les robots anthropomorphiques et la reproduction de comportements humains. Si l’homme et son cerveau peuvent être considérés comme un modèle ou une source d’inspiration, il faut se séparer de cette analogie pour bien comprendre l’intelligence artificielle. Et il est indispensable de différencier le contenant du contenu : un robot n’est qu’une enveloppe, il matérialise l’intelligence artificielle en créant une interface (une voix comme Siri, un personnage contrôlé par ordinateur dans un jeu vidéo, etc…).

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« Computing machinery and intelligence », premier article scientifique à définir l’IA

L’intelligence artificielle d’une machine ou d’un programme informatique est ce qui le rend capable d’effectuer des tâches demandant un apprentissage, une organisation de la mémoire et un raisonnement. L’idée est de permettre à un ordinateur de répondre à une problématique plus ou moins étendue en lui fournissant les bonnes données et les bons logiciels pour les interpréter et retourner une information ou une action pertinente.

Les premiers pas de la notion même d’intelligence artificielle remontent au milieu du XXe siècle et aux premières recherches d’Alan Turing sur la conscience de la machine et de sa potentielle intelligence. Son idée était de créer une machine capable d’imiter l’homme de telle sorte qu’un tiers ne puisse pas savoir s’il dialogue avec un ordinateur ou un humain (le fameux Imitiation Game, qui donnera son nom au film presque aussi brillant que le personnage). Cet objectif n’a jamais été atteint mais il reste un test étalon et montre la voie à de très nombreux travaux.

AI : deux niveaux aujourd’hui, trois demain

En regardant les grands travaux réalisés sur l’intelligence artificielle par les plus grands représentants des sciences exactes (mathématiques, physique, informatique, …) et des sciences humaines (sociologie, psychologie, …), on constate que deux grandes catégories d’intelligences artificielles ont été définies depuis les écrits précurseurs de Turing.

Artificial Narrow Intelligence – ANI (Intelligence artificielle faible)

Il s’agit là de l’approche la plus pragmatique de l’intelligence artificielle, qui serait construite par l’homme progressivement pour répondre à un ou plusieurs objectifs précis. Le système est capable de reproduire une action ou de répondre à un problème selon sa programmation, sans jamais pouvoir dépasser le périmètre de sa conception.

L’idée est de rendre la machine de plus en plus performante et donc intelligente dans un domaine en particulier. Elles peuvent enrichir leur base de connaissances de manière autonome, mais toujours de la même façon et avec la même finalité.

Prenons l’exemple des logiciels de reconnaissances vocales : plus on utilise, plus celui-ci se perfectionne et reconnait bien les mots que l’on prononce. Effectivement, l’intelligence artificielle lui permet d’acquérir en quelque sorte de l' »expérience » et de s’améliorer, mais cela se restreint à un seul et unique domaine : la reconnaissance vocale.

Progressivement, ces machines sont devenues de plus en plus complexes; qui est capable aujourd’hui d’expliquer le fonctionnement des algorithmes de Google, ou pourquoi telle ou telle personne ou célébrité nous sont suggérés sur Twitter ou Facebook ?

Ces intelligences artificielles resteront cependant toujours limitées par leur fonction initiale, et les capacités de chacun des systèmes les composant prévus en conséquence.

Artificial General Intelligence – AGI (Intelligence artificielle forte)

Plus difficile à appréhender et à expliquer, c’est aussi la famille d’IA impliquant le plus de débats chez les philosophes, sociologues, ou autres ethnologues.

L’intelligence artificielle forte se différencie de sa petite sœur par sa capacité à dépasser sa fonction initiale, à apprendre de nouveaux champs de connaissance seule, de raisonner et de résoudre des problématiques nouvelles, de se baser sur l’expérience pour évoluer, etc. En un mot, s’élever au niveau de l’intelligence humaine.

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« I’m sorry, Dave. I’m afraid I can’t do that. « 

Nous ne sommes pas encore technologiquement au point pour créer ce type d’intelligence artificielle, mais la science-fiction s’attèle depuis des années à l’imaginer. Prenons l’exemple du célèbre ordinateur HAL 9000 dans le film 2001: l’Odyssée de l’espace de Stanley Kubrick. A la base programmé pour aider les voyageurs de l’espace dans leur mission d’exploration, HAL développe un raisonnement sur sa raison d’être et sa véritable mission, et en arrive à vouloir se débarrasser de l’équipage sur lequel il avait initialement pour but de veiller. Avant d’être déconnecté, ce dernier fini par avoir avoir peur, preuve qu’il a su évoluer suffisamment pour ressentir une émotion humaine. Il est en quelque sorte l’aboutissement de l’AGI.

C’est cette forme d’intelligence artificielle qui déchaîne les passions dans les plus hautes sphères de la science : le jour où cette technologie arrivera à maturation, la place de l’homme sera remise en question et ce dans tous les domaines.

Et demain la super intelligence artificielle ? (Artificial Superintelligence – ASI)

Moins documenté pour l’instant, les scientifiques se penchent aujourd’hui sur une autre forme d’intelligence artificielle, en se concentrant surtout sur le concept même et l’éthique associée : il s’agit de la super-intelligence artificielle (Artificial Superintelligence – ASI).

Contrairement à l’intellect humain, l’intelligence artificielle forte n’aurait à priori pas de limite dans son évolution (qui serait exponentielle, si l’on se réfère à la Loi de Moore) et pourrait donc théoriquement surpasser l’intelligence humaine, pour atteindre des niveaux qui dépassent notre entendement.

Cette super intelligence serait au-delà de ce que nous sommes capables d’imaginer, bien meilleure que l’intelligence humaine dans tous les domaines. Elle serait capable d’apprendre d’elle même de nouveaux sujets ou thématiques à un rythme exponentiel : une fois ce niveau d’intelligence atteint, l’accroissement de ses capacités seraient tellement rapide que tous les paradigmes de l’intelligence artificielle pourraient ne plus être valables, et l’homme pourrait être amené à disparaitre ou à se transcender – les visions vont des plus pessimistes au plus optimistes sur le sujet (nous aborderons cette prospective inquiétante et/ou excitante dans un prochain éclairage).

AI : malgré une évolution incroyable, des progrès souvent insoupçonnés du grand public

John McCarthy, l’un des pères fondateurs de la discipline et créateur du terme même d’intelligence artificielle en 1956, disait notamment que « dès que quelque chose fonctionne, plus personne ne l’appelle intelligence artificielle ». Cela illustre bien l’état actuel des choses : le grand public a peu conscience de l’avancement de la recherche scientifique sur le sujet et l’intelligence artificielle reste l’apanage des films et de quelques projets farfelus. Pourtant derrière leur écran, ou dans leur poche, se cachent déjà des intelligences artificielles qui feraient pâlir les plus grands experts de la fin du XXème siècle.

Pour autant, cela fait plusieurs années que les applications concrètes voient le jour dans de nombreuses disciplines. Certaines sont connues, comme Watson d’IBM capable de jouer à Jeopardy, ou encore Deep Blue, vainqueur contre le meilleur joueur d’échec au monde (toujours d’origine IBM). Mais la plupart sont diffuses : armée, banque, médecine, logistique, jeux vidéos…

Un excellent article sur ce sujet, publié sur le tout aussi excellent site américain de vulgarisation scientifique « Wait but why », illustre bien ce paradoxe entre le progrès incroyable des intelligences artificielles,  et l’incapacité d’homme à l’appréhender, avec ces deux petits schémas assez impertinents :

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Pour le commun des mortels, l’intelligence artificielle a péniblement progressé du niveau d’un insecte à celui d’un singe pendant ces dernières décennies ; niveaux d’intelligence qui ne prêtent pas vraiment à susciter leur admiration, tout juste l’amusement. En réalité, le progrès entre le niveau de la fourmi et celui du singe est exponentiel, la dynamique prometteuse de ces dernières années laisse présager d’une évolution tout aussi exponentielle dans le futur…

Pour sortir de l’approche théorique de cette première partie, le prochain article se penchera sur les premières applications de l’intelligence artificielle et sur les principales technologies que nous utilisons maintenant tous les jours.

Mais d’ici là, peut-être qu’une intelligence artificielle sera capable de le rédiger à notre place ?

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