Lancé fin 2013 par Apple, l’iBeacon a fait couler beaucoup d’encre en 2014. Et pourtant la page est loin d’être tournée. En effet, cette petite balise était au cœur de toutes les attentions lors du Retail’s Big Show 2015.
Les acteurs du Retail voient dans ces petits capteurs l’avenir de la relation client par leurs capacités à adresser aux consommateurs des messages personnalisés via leurs smartphones. Les associations de défense des consommateurs dénoncent quant à elles une nouvelle intrusion dans la vie privée.
Entre fantasmes et controverses, comment les Beacon peuvent-ils réellement transformer nos habitudes d’achats ?
Beacons : mode d’emploi ?
Petit nouveau face à la NFC (Near Field Communication) et à la RFID (Radio Frequency Indentification), l’iBeacon est une balise BLE (Bluetooth Low Energy). Cette technologie de micro-localisation labélisée par Apple permet de détecter la présence d’une personne possédant un smartphone dans un rayon de 50m (magasin, rue, pièce). La technologie Beacon fonctionne par une relation entre trois entités :
- La balise Beacon qui transmet le signal BLE
- Un device de type smartphone (compatible avec iOS mais aussi Androïd). Depuis 2010, le BLE est intégré au Bluetooth 4.0 des smartphones.
- Un récepteur présent dans la zone de signal. Ce dernier sera alors informé et guidé par des informations envoyées sur son téléphone. Cependant, pour que la relation puisse avoir lieu, il faut que le récepteur ait préalablement installé l’application, activé le Bluetooth et autorisé la réception de notifications.
Aussi, par ses capacités de tracking, d’information, sa souplesse d’utilisation et son coût d’installation relativement accessible, les beacons offrent une palette de possibilités très large, comme le souligne l’article iBeacon d’Apple : la chasse aux balises a commencé!. Le monde du Retail est particulièrement intéressé par cette technologie pour attirer et fidéliser la génération smartphone. C’est pourquoi, selon ABI Research, le marché du hardware iBeacon devrait atteindre les 60 millions d’unités d’ici 2019, soit environ 500 millions de dollars.
Lorsque votre smartphone devient votre meilleur ami
Lors du Retail’s Big Show 2015, rendez-vous international du Retail à New York, le focus était donné sur la personnalisation du parcours et la proximité avec le client. Les nouvelles tendances promettent une relation plus directe et efficace avec le consommateur grâce à la transversalité des systèmes d’information.
Partant du constat que 95% des achats se déroulent encore en magasin et que 89% des consommateurs utilisent leurs téléphones pendant leurs courses, les acteurs du Retail voient dans les beacons un véritable Eldorado. En effet, l’objectif est de transformer le smartphone en un relai actif de la relation client. Selon une étude de BI Intelligence, les ventes réalisées grâce aux beacons pourraient atteindre 4 milliards de dollars en 2015 et 44 milliards en 2016.
Plusieurs utilisations existent déjà, comme l’envoi de simples messages. Par exemple le nouveau centre commercial de Marseille, les Terrasses du Port, a installé en 2014, 250 balises à travers le centre pour permettre aux magasins d’envoyer des messages ciblés (mot de bienvenue, offres promotionnelles…) à leur clientèle via l’appli. Ces messages ne sont qu’une première étape vers l’élaboration d’un service client unique et l’hyperpersonnalisation du parcours consommateur. Certaines entreprises n’hésitent pas à personnaliser les fonctionnalités du Beacon afin de concevoir des offres à forte valeur ajoutée servicielle :
- Magasin augmenté et ludique : au croisement entre un magasin physique et la réalité virtuelle, un des leaders mondiaux de la vente de jeux vidéo, Gamestop propose de transformer ses points de ventes en parties de jeux vidéo. En fonction de ses préférences et de sa position dans le magasin, le client recevra des notifications et des invitations à tester les produits. Son smartphone sera ainsi transformé en manette de jeux à la demande.
- Service sur mesure et assistant personnel de shopping : ce sont les objectifs que ce sont donnés les enseignes de mode Tata et Khol’s. Tata propose un service propre à la cabine d’essayage. L’application sera customisée pour répondre aux besoins de la cabine avec des services comme la possibilité pour les clients de communiquer via leurs smartphones avec les vendeurs qui recevront ainsi toutes les informations nécessaires. Khol’s va encore plus loin en travaillant sur une application personnalisable en fonction du profil de chaque client et qui lui indiquera les produits les plus susceptibles de lui convenir. Les traditionnels mannequins d’exposition sont, eux aussi, mis à contribution en se mettant à communiquer avec la clientèle. Quelques marques britanniques dont Ted Baker via l’application Iconeme, ont décidé de mettre en place des mannequins « intelligents » (envoi de notifications, de réductions, géolocalisation dans le magasin et autres renseignements produits).
- Simplification de paiement : les modes de paiement sont en pleine révolution : paiements sans contact, cartes uniques….SmartBeacon, une société française, propose, grâce aux balises, d’allier un service de géolocalisation des produits en magasin avec un système simple de paiement intégré directement à l’application. Aussi, le client n’aura plus qu’à poser son doigt sur le bouton de reconnaissance d’empreinte digitale et le paiement s’effectuera (utilisation d’un compte PayPal).
Un déploiement freiné par de nombreuses contraintes
Ces différents exemples témoignent de la richesse des promesses de l’iBeacon et de sa versatilité. Cependant, des problèmes de protection des données, de pertinence et de technologies sont pointés du doigt, représentant à la fois un risque pour l’application et les données de l’utilisateur. Ces difficultés freinent l’adoption de cette technologie :
- La protection des données : comme le souligne iBeacon d’Apple : la chasse aux balises a commencé, le respect de la vie privée est un véritable enjeu. En effet, les données issues des profils (habitudes d’achat, préférences, géolocalisation) peuvent être collectées et exploitées à l’instar des utilisateurs.
- Le manque de pertinence : les notifications envoyées sont largement considérées comme intempestives. En effet, selon une étude de Venture Beat, 41% des personnes interrogées considèrent que les push ne sont pas pertinents (sans intérêt ou mal localisées) et 37% déclarent ces alertes sont sans valeur ajoutée. Ainsi, un travail sur la personnalisation des messages reste encore à faire.
- Des défis techniques : malgré la prolifération d’entreprises spécialisées dans les beacons : Estimote, Qualcomm, Gelo, Kontakt….. , ces petites balises ont une durée de vie assez limitée, en moyenne deux ans. En plus du coût d’acquisition (entre 30 et 75€ par pièce), le renouvellement d’un parc de balises représentera un coût conséquent et une barrière à l’entrée pour les entreprises. C’est pourquoi, avant la généralisation de cette technologie, les acteurs du retail devront améliorer la pertinence des notifications tout en assurant la sécurité des données de l’utilisateur.
Il nous reste encore un certain nombre de séances shopping à faire entre amis avant de pouvoir (enfin?) les remplacer par nos fidèles téléphones.