Dans un peu moins d’un an, l’ICANN, l’organisme en charge de l’attribution des noms de domaines sur Internet, jusqu’à présent sous tutelle américaine, devra proposer un nouveau système de gouvernance à dimension internationale. Éclairage sur cette petite révolution aux enjeux colossaux.
L’ICANN, un organisme de régulation mondial sous « contrôle » américain
Créée en 1998 sous l’impulsion du gouvernement américain, l’ICANN (pour Internet Corporation for Assigned Names and Numbers) est une société à but non lucratif placée sous le droit californien et donc sous la tutelle du département américain du Commerce.
Sa missions est simple : « le rôle de coordination […] au sein du système d’attribution de noms Internet » et œuvrer au « maintien de la sécurité, de la stabilité et de l’interopérabilité d’Internet.»
Si la tutelle du gouvernement américain était initialement prévue jusqu’en 2009, elle fut prolongée faute d’accord entre l’ICANN et le gouvernement. Cependant, les récentes révélations d’Edward Snowden sur le cyber espionnage mondial réalisé par les États-Unis ont largement remis en cause cette dépendance. En mars dernier, sous la pression de la communauté internationale, Barack Obama a alors annoncé une remise en cause de ce système avec l’objectif de construire un nouveau modèle de gouvernance, indépendant et international, pour septembre 2015.
Une évolution difficile à mettre en place
Afin d’aboutir à un consensus international, de nombreux forums sont organisés par l’ICANN comme celui d’octobre dernier à Los Angeles. Cependant, le peu d’avancée majeure sur le sujet révèle toute la complexité de cette mission. Principal point de divergence : le futur modèle de gouvernance de l’organisation. D’un côté, il y a la volonté de nombreux pays de donner cette responsabilité à un organisme intergouvernemental comme l’ONU. De l’autre, les États-Unis qui, part l’intermédiaire de la ministre du commerce américain, ont réaffirmé leur volonté « qu’Internet au niveau mondial ne soit pas récupéré par un individu, une entité ou une nation cherchant à imposer leur propre vision du monde sur la sagesse collective de cette communauté ».
Des enjeux techniques, diplomatiques mais surtout économiques
Si la gouvernance de l’ICANN fait tant débat, c’est parce que Internet est aujourd’hui une technologie mondiale mais surtout parce que derrière cette gouvernance, c’est tout le marché de la vente des noms de domaines qui est concerné.
Elle fut notamment fortement remise en cause par la secrétaire d’État au numérique française Axel Lemaire suite au refus de l’ICANN de suspendre l’attribution des « .vin » dénonçant « l’incapacité » de l’ICANN à « prendre en compte les préoccupations légitimes des États et à garantir une gestion commune des ressources dans le sens du respect de la diversité culturelle et de l’équilibre des intérêts dans les secteurs économiques que ses décisions affectent ».
Derrière ce sujet, ce sont donc des enjeux internationaux mais aussi nationaux qui se jouent. D’après le calendrier, il reste 11 mois aux gouvernements pour s’accorder sur l’avenir de la gouvernance de l’Internet.
Le président de l’ICANN, Fadi Chehadé, se veut lui confiant et a précisé qu’un projet de loi serait proposé par l’ICANN l’année prochaine afin de préparer et encadrer cette transition pour la fin 2015. Prochain rendez-vous : en février à Singapour.
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