Le phénomène BYOD « Bring Your Own Device » prend de plus en plus d’ampleur au sein de nos sociétés actuelles. Ce concept simple consiste en l’utilisation d’équipements personnels dans un cadre professionnel. Malgré un engouement fort suscité par les entreprises françaises et la maturité des technologies aujourd’hui, celles-ci hésitent parfois à déployer massivement ce nouveau modèle. Quelles sont les réelles raisons de ce paradoxe français ?
Tout d’abord, il est intéressant de rappeler les facteurs à l’origine du succès de cette tendance. D’une part, un tel emballement peut s’expliquer par l’arrivée de la génération Y dans le monde du travail, la consumérisation (pénétration dans l’entreprise des outils de communication grand public), l’évolution des usages en termes de mobilité et de définition d’espace de travail (apparition de nouvelles applications métiers, nouveaux périphériques de type Smartphones, tablettes…), l’évolution des usages vers des logiques de Software as a Service. D’autre part, tous les collaborateurs d’une entreprise ne sont pas forcément éligibles à une offre professionnelle d’équipements comme les terminaux mobiles, clés 3G…Les délais de déploiement de terminaux mobiles parfois longs entraînent une impatience chez certaines personnes qui ne trouvent aucun inconvénient à apporter leurs matériels personnels. Il arrive parfois que les offres de mobilité proposées par les entreprises ont un train de retard par rapport aux dernières technologies. Il existe donc autant de raisons qui poussent le salarié à prendre des initiatives et promouvoir des usages nouveaux.
Mais qu’en est-il réellement du BYOD en France aujourd’hui?
Le BYOD est déjà une réalité. De nouveaux projets voient le jour en France. Les entreprises n’hésitent plus à prendre les devants en démarrant des études plus approfondies ou en déployant les premiers programmes BYOD. Toutefois, même si les entreprises françaises acceptent de faire le grand saut, elles se trouvent confrontées à de fortes contraintes juridiques et RH si bien que certaines peinent parfois à lancer des projets de grande envergure préférant ainsi se tourner vers des solutions pro/perso plus classiques. En effet, aujourd’hui les entreprises doivent négocier avec les partenaires sociaux sur la thématique équilibre vie professionnelle / vie privée et le BYOD est un des moyens pour faire justement tomber la frontière entre ces deux sphères. N’oublions pas que la France est très touchée par le phénomène du stress au travail (France Télécom, La Poste, Renault notamment) et le législateur est de plus en plus vigilant. La notion de temps de travail est également plus floue ; le BYOD marque en ce sens une véritable rupture.
A l’inverse des entreprises françaises, ce phénomène connaît un succès sans précédent auprès d’entreprises internationales du secteur des nouvelles technologies. Les usages sont même en passe de se banaliser.
Cisco en est une parfaite illustration avec le déploiement d’un programme BYOD à grande échelle. La satisfaction utilisateur est telle que le groupe voit sans cesse apparaître sur son réseau pas moins de 500 Ipad par mois!
Citrix, fournisseur de technologies de virtualisation, pour sa part, a alloué une enveloppe budgétaire de 2100$ à chaque employé désirant intégrer le programme BYOD. Des procédures ont, certes, été définies afin d’encadrer au plus près cet usage (justification d’une ancienneté de 12 mois, installation de logiciel antivirus fourni par l’entreprise, souscription à un support de 3 ans, signature d’une charte…). Résultat, Citrix a réalisé entre 15 et 20% d’économie sur le TCO. Il va de soi qu’il est plus facile de déployer ce type de programme avec une population ayant une forte appétence pour les nouvelles technologies et un certain niveau de compétence pour assurer aisément soi-même une maintenance du matériel.
Colgate-Palmolive a lancé un programme BYOD en mars 2011, en mettant en place un site web permettant aux employés d’enregistrer leurs téléphones personnels et tablettes. Les salariés sont ensuite autorisés à télécharger sur leur équipement une application « Traveler » conçue par IBM donnant accès à leurs emails et leur agenda Pro. 400 personnes se sont enregistrées le premier jour et on comptabilisait 2500 utilisateurs cinq mois plus tard.
Ford Motor n’est pas en reste puisqu’il a initié un programme BYOD en mai 2007. Deux ans plus tard en 2009, Ford motor a mis en place un programme ePOD (eMail on Personnal Own Device) afin de répondre à une demande croissante des salariés. La solution s’est très vite rendue populaire auprès des collaborateurs. Ford a désormais 2700 salariés dans son programme (800 avec des Blackberrys fournis par l’entreprise et 1900 collaborateurs qui disposent d’Ipad, Iphone, Ipod Touch sécurisés avec un logiciel MDM). Les facteurs clé de succès de ce programme passent sans doute par la mise en place d’une équipe transverse composée d’experts IT, juristes, RH, comptables dont l’objectif fut de quantifier les risques (sécurité, support client…), le soutien indéniable de la direction, la maîtrise d’un champ d’applications restreint et la mise en place de TCO faible.
Ce phénomène se traduit concrètement aujourd’hui en France par des réflexions menées par de grands comptes.
Les premiers efforts se sont portés sur les aspects techniques (sécurité, réseau, protection des données…) dont les technologies trouvent pleinement leur légitimité.
Nos retours opérationnels terrain et les retours d’expérience de nos consultants vont clairement dans ce sens : plus que techniques, les principaux chantiers à adresser à ce jour s’avèrent juridique et RH pour que le phénomène soit en mesure de se généraliser complètement. Il reste que les employés n’ont pas attendu l’approbation de leur direction pour pratiquer le BYOD de façon non officielle…
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