Il y a un an à peine, le mouvement Open Data ne faisait pas encore beaucoup de bruit et la France était incontestablement à la traîne sur le sujet. Aujourd’hui et depuis six mois, 6 personnes travaillent à temps plein à la création de data.gouv.fr, portail national de mise à disposition de données publiques dont l’ouverture est prévue pour décembre 2011.
L’Open Data, c’est quoi ?
À l’heure actuelle, il n’existe pas de définition juridique reconnue de l’open data. Néanmoins, de nombreuses associations – anglo-saxonnes notamment, comme l’Open Knowledge Foundation – ont proposé divers critères de définition d’une donnée ouverte.
Pour faire simple, nous retiendrons donc qu’une donnée ouverte (open data) est une donnée libre de droits, accessible publiquement, gratuitement, et sans condition discriminatoire, proposée dans un format exploitable et non propriétaire.
Quelles données sont concernées ?
Plans et horaires des transports publics, base des prix du carburant, lieux d’accident de la route, données environnementales, … En théorie, toutes les données publiques peuvent être publiées, à l’exception des données nominatives, et de celles qui relèvent de la vie privée et de la sécurité. En pratique, cela s’avère assez complexe, tout d’abord puisque certaines données sont à la frontière du public et du privé, mais également parce que la mise à disposition de certaines informations présente une dangerosité potentielle, de sécurité voire de défense nationale.
Qui sont les acteurs de l’Open Data ?
Le mouvement Open Data prend forme au sein d’un écosystème dynamique, composé de producteurs et de réutilisateurs de données, mais aussi d’animateurs et de catalyseurs de l’Open Data (organisateurs d’appels à projets ou de concours d’applications par exemple).
Deux autorités occupent le rôle de médiateurs et de régulateurs de la libération et de la réutilisation des données. La CADA (Commission d’Accès aux Documents Administratifs) intervient auprès des particuliers qui se heurtent à un refus d’accès ou de réutilisation d’informations publiques, et répondent aux sollicitations des administrations demandant des conseils sur le caractère communicable ou réutilisable de documents. La CNIL, quant à elle, veille à l’anonymisation des données ou des statistiques qui pourraient révéler des informations personnelles.
Trois enjeux majeurs portent la libération et la libre réutilisation des données publiques au-devant de la scène politique des grandes économies mondiales
Les pays anglo-saxons pionniers de l’Open Data ; la France emboîte le pas et rattrape son retard
Le mouvement Open Data est né aux États-Unis en 2005 du succès rencontré par une application développée par un journaliste et programmeur, ChicagoCrime.org (rebaptisé EveryBlock depuis 2007), qui renseigne sur une carte les données relatives aux crimes et délits commis dans la ville de Chicago et récupérées auprès de la municipalité.
Dès lors, l’ouverture des données s’est effectuée aux États-Unis du bas vers le haut. Les villes de Washington, New York, San Francisco, ont entrepris de recenser des collections de données, puis d’ouvrir des « data stores » pour mettre ces collections de données à la disposition du public des entreprises, des développeurs et des citoyens.
Ces démarches de « libération » des données publiques sont très souvent accompagnées de concours d’applications pour encourager la réutilisation des données rendues publiques.
Ce mouvement fut alors l’un des piliers du programme du candidat Barack Obama lors des campagnes présidentielles de 2008, et fait désormais l’objet d’une politique au niveau fédéral. Quatre mois seulement après l’investiture d’Obama, le 21 mai 2009, le portail fédéral data.gov est mis en ligne. Près de 400 000 jeux de données y sont aujourd’hui recensées, et plus de 1 000 applications ont vu le jour à partir de la réutilisation de ces données.
En Europe, le Grande-Bretagne fait figure de pionnier de l’Open Data. Le phénomène y a pris de l’ampleur sous l’impulsion d’un mouvement sociétal. La création de l’Open Knowledge Foundation, devenue l’association de référence sur le sujet, la campagne Free Our Data menée par le célèbre quotidien The Guardian, ainsi que l’engagement de figures emblématiques comme Tim Berners-Lee (créateur du web) auprès du gouvernement de Gordon Brown, ont mené la Grande-Bretagne à son tour vers l’ouverture d’un portail national de mise à disposition de données : data.gov.uk.
Évidemment, la première des réactions serait de souligner que la France est en retard sur le sujet. Mais à y regarder de près, la France s’inspire très largement des modèles américain et anglais et les choses s’opèrent beaucoup plus rapidement. Le 30 juin 2010, la Président de la République acte pour la création d’un portail unique des informations publiques data.gouv.fr ; le 21 février 2011, la mission interministérielle Etalab, placée sous l’autorité du Premier Ministre, est chargée de la création du portail, pour une mise en ligne prévue en décembre 2011.
Parallèlement, les initiatives locales se multiplient au niveau des villes et régions, et plusieurs plateformes alternatives à la future plateforme nationale germent de part et d’autre.
Après Rennes, ce sont Paris, Montpellier et Bordeaux qui ont ouvert leur plateforme de données. Marseille et Nantes ont également affiché leur volonté de suivre le mouvement.
Un premier bilan en demi-teinte, mais un mouvement de fond bien présent, un engouement certain de la part des réutilisateurs et un cadre législatif favorable
Aujourd’hui, seul l’objectif de transparence semble avoir été satisfait, alors que l’amélioration du service public n’est pas évidente, et que la réelle contribution de l’Open Data à l’innovation et l’économie numérique est difficilement appréciable.
Néanmoins, au-delà des initiatives gouvernementales, le mouvement sociétal qui a propulsé l’Open Data au cœur du débat public est toujours présent (initiatives citoyennes, associations, journaux, leaders d’opinion…) et le succès rencontré par les concours d’applications et appels à projets témoigne d’un engouement certain de la communauté des développeurs. De plus, les législations européennes et françaises (loi du 17 juillet 1978, directives PSI en 2003 et INSPIRE en 2008) posent en principe la liberté de réutilisation des données publiques.
Nous ne serions donc qu’au début de l’ère Open Data, et il y a fort à parier que les obligations de libération de données, formulées par le gouvernement et qui ne concernent à l’heure actuelle que les acteurs publics (institutions publiques, collectivités territoriales…), s’appliqueront demain à un éventail plus large de producteurs de données, comme les entreprises privées, et en particulier les entreprises exerçant une mission de service public. Affaire à suivre…
Je pense que la France, même si elle avait du retard au lancement, est sur la bonne voie pour la diffusion de l’open data.
Les villes et les départements se prêtent volontiers au jeu et de plus de plus de données publiques sont publiées dans des formats propres pour la majorité.
Il est dommage que le movement de l’open dat est tellement peu connu parmi les entreprises et parmi les citoyens. Après il sera intéressant d’avoir votre avis si ce sont plûtot les citoyens qui seraient capables d’animer ce débat ou les développeurs utilisants les données crues. Qu’est-ce que vous en pensez ?